Comment ce premier exemple de l'architecture à la française passa d'une résidence ducale à la première prison pour femmes en France ?
L'histoire du château de Cadillac débute grâce à Henri III qui élève au rang de premier duc d'Épernon son favori Jean-Louis de Nogaret de La Valette. Lequel pour montrer son rang fait bâtir dès 1599, cette magnifique demeure d'apparat qui conserve encore dans ses murs de riches décors mais surtout des cheminées monumentales.
Zoom sur les appartements du duc :
L'appartement du duc est composé de 3 pièces : la première conserve une cheminée, c'est le seul décor qui résista à l'incendie de 1928. Au centre, une œuvre de l'artiste Julien Salaud datant de 2017 mais ce qui m'intéresse se situe tout en haut de la cheminée, cette croix fut placée au XIXe siècle pour la chapelle de la prison.
À suivre l'antichambre qui possède la plus ancienne cheminée des lieux. À l'origine, cette salle était beaucoup plus grande car elle englobait la précédente, c'est au XIXe siècle qu'elle est divisée en 2 afin d'y aménager une sacristie pour la chapelle et un réfectoire pour les sœurs surveillant la prison.
La chambre à coucher du second duc est tout d'abord un cabinet particulier pour le premier duc. Le mobilier n'est pas d'origine mais il permet d'imaginer à quoi cette chambre pouvait ressembler à l'origine. Au temps de la prison, cette pièce était une salle de récréation pour les sœurs.
Zoom sur les appartements de la duchesse :
Comme dans les appartements du duc, ici aussi, ils sont divisés en plusieurs pièces dont la fonction fut modifiée quand le château servi de prison pour femmes.
Cette première pièce épargnée par l'incendie de 1928 et a su garder son plafond peint orné de rinceaux et du monogramme du duc et de la duchesse. La cheminée nous montre le portrait de Bernard, le second duc d'Epernon.
Au XIXe siècle, ces appartements devinrent le dortoir de l'infirmerie.
La présence du portrait d'Anne d'Autriche sur la cheminée de l'antichambre nous indique que la reine est venue ici à 2 reprises en 1632 et en 1659.
À la période carcérale, cette pièce était l'infirmerie.
Ce cabinet dit doré non pas à cause de sa couleur jaune mais bien en raison du lambris doré qui recouvrait les murs, hélas disparus. De ce décor il ne reste que le plafond à caissons ornés de scènes mythologiques et qu'une frise avec le monogramme du duc.
Au XIXe siècle, cette pièce est transformée pour servir de dortoir pour les convalescentes.
Au première étage, ce sont les appartements du roi et de la reine avec toujours des pièces à enfilades. Cet étage était entièrement composé de dortoirs pour les détenues. En entrant dans l'appartement du roi n'oubliez pas de regarder la porte qui porte encore les stigmates de la période carcérale.
Zoom sur les appartements du roi :
Cette pièce était décorée à la gloire d'Henri III symbole de la loyauté qu'avait le duc d'Epernon pour ce roi qui l'avait fait grand. On pouvait y admirer des tapisseries racontant les exploits militaires du roi. Le second duc la transforma en pièce de billard.
A la suite de cette grande salle, une antichambre qui à la gloire là aussi d'Henri III, mais ici c'était des tapisseries retraçant sa vie qui décoraient la pièce.
Sur la cheminée des allégories représentent : la Force, la Renommée ou encore l'Abondance.
Zoom sur les appartements de la reine :
La seule chose que nous connaissions de cette pièce c'est qu'elle servit d'appartements pour loger la famille royale et la Cour lors de la venue de Louis XIV et de la reine Anne d'Autriche.
Zoom sur la vie de Jean-Louis de Nogaret de La Valette :
Issu d'une modeste noblesse, il est né dans le Gers en 1554 au château de Caumont.
Second de sa famille, il est naturellement destiné à une carrière de militaire. Avec son frère ainé, ils vont combattre pendant les Guerres de Religion et participeront au siège de La Rochelle en 1573 avec le futur Henri III.
En 1587, il épouse Marguerite de Foix-Candale la petite-fille du connétable de Montmorency mais hélas elle meurt en 1593 après la naissance de son 3ᵉ enfant.
Marginalisé par Richelieu, il finira sa vie en résidence surveillée à Loches.
Son fils, Bernard devient le 2nd duc d'Epernon mais il meurt sans héritier en 1661.
En 1818, l'État rachète le château pour y installer la première Maison centrale de force et de correction pour femmes tenue par des religieuses. Puis en 1891, le château laisse place à une école de préservation pour jeunes filles, les dortoirs sont remplacés par ses "cages à poule" encore visible dans les combles. En 1928, un incendie va ravager la partie Nord du château peut-être dû à une mutinerie.
L'école ferme en 1952 et l'État retrouve un monument très abimé, des travaux sont entrepris mais c'est au XXIe siècle qu'il est décidé valorisé l'histoire de Cadillac.
Mon avis :
On ne peut pas contester que la valeur du château est bien ses cheminées mais je suis toujours frustrée quand je visite des châteaux vides de mobilier alors que les réserves des Monuments Historiques en regorgent.
Mes sources :
Documents de visite et panneaux explicatif présents dans le château
https://www.chateau-cadillac.fr/decouvrir/une-prison-qui-fait-froid-dans-le-dos